Les compagnies Low-Cost : Vraiment moins chères?

Les revenus annexes sont devenus le nouveau nerf de la guerre des compagnies aériennes. Affaiblies par la crise économique, toutes tendent vers une même stratégie commerciale pour apparaître en bonne place sur les comparateurs Internet. Elles déshabillent leur offre pour afficher un prix de base compétitif et facturent parallèlement certains services. Efficace ! Le consommateur succombe à un prix attractif, ne découvrant l’addition finale qu’ensuite. Ainsi, un vol Ryanair apparaissant moins cher qu’un vol Air France se révèle plus cher quand le client a franchi toutes les étapes donnant lieu à facturation.
Selon une étude réalisée par le cabinet IdeaWorks, en collaboration avec Amadeus, leader mondial des solutions de réservations, les recettes dites additionnelles auraient atteint 18,4 milliards d’euros en 2010 pour l’ensemble des transporteurs. Soit onze fois plus qu’en 2006. « Si tous les transporteurs parviennent au niveau des quelques compagnies leaders dans ce domaine, on pourrait assister prochainement à leur triplement », note Philippe Chérèque, vice-président commercial exécutif d’Amadeus.
Un tarif global devenu illisible pour le consommateur
« C’est une nouvelle perte de lisibilité du prix global payé », dénonce, de son côté, Jean-Pierre Mas, président des réseaux d’agences Selectour et Afat Voyages. C’est là que le bât blesse pour les clients ! Les comparaisons de prix entre transporteurs deviennent compliquées, le consommateur devant être toujours plus attentif lors d’une réservation. Au final, ces nouvelles pratiques s’apparentent à une hausse déguisée des tarifs.
C’est tout particulièrement vrai chez les low costs, pour qui ces revenus représentent jusqu’à 20 % de leur chiffre d’affaires. Certes, les voyageurs se sont habitués à devoir tout acheter à bord, du verre d’eau au sandwich, sur le principe du « chacun paie uniquement pour ce qu’il consomme ». Mais face à la flambée du prix du kérosène, et ne pouvant appliquer de surcharges carburant sans discréditer leur politique de petits prix, ces transporteurs ne cessent d’inventer de nouvelles options payantes. Cela se vérifie notamment pour les bagages. Ainsi le poids autorisé gratuitement en cabine ne cesse de dégringoler. Il est désormais à 6 kilos seulement sur Air Berlin, par exemple. A l’inverse, le prix facturé pour le moindre bagage en soute s’envole. Il est passé de 6 à 20 euros chez Ryanair en trois ans ! Pour payer moins cher, il va falloir voyager de plus en plus léger ! Transavia, la filiale à bas prix d’Air France-KLM, fait payer les bagages en soute depuis le 5 avril, soit 7 euros pour 15 kilos. Elle promet en contrepartie une baisse de ses tarifs…
De plus, certaines prestations sont désormais exclues du prix du billet, alors même qu’elles sont obligatoires. Depuis 2009, Ryanair facture par exemple 6 euros pour s’enregistrer sur Internet. Autre pratique tout aussi discutable : les frais pour règlement par carte de crédit se généralisent et ce, alors même que la législation française l’interdit. Et impossible de payer sur le Web avec un autre moyen de paiement ! Chez Easyjet, ces frais atteignent 12,50 euros. Pour se justifier, la compagnie précise que son site marchand est de droit… britannique. « C’est aberrant ! Il faut désormais payer pour pouvoir payer », dénonce Jean-Pierre Mas. Le site quellecompagnie.com est une source d’informations inépuisable pour déjouer tous ces pièges…
Les prestations gratuites en voie de disparition
Ce modèle low cost a été partiellement copié par les grandes compagnies américaines traditionnelles, d’American Airlines à United en passant par Delta Airlines, secouées financièrement depuis plusieurs années. « Il nous fallait demeurer profitables sans trop couper dans notre réseau », justifie Béatrice de Rotalier, directrice France de Delta. D’où le choix de réduire les prestations gratuites. Toutes facturent désormais boissons alcoolisées et repas sur leurs vols intérieurs, bagages en soute, parfois la couverture (5 dollars chez American Airlines) et même les écouteurs pour regarder le film (Air Transat). Une pratique qui avait disparu depuis vingt ans ! « C’est la contrepartie du maintien de prix bas en classe économique »,ajoute Jacques Alonso, directeur France de la compagnie American Airlines.
La tendance est moins radicale en Asie et en Europe, mais jusqu’à quand ? Le modèle américain finit tôt ou tard par faire école de ce côté-ci de l’Atlantique. Pour l’heure, seules les espagnoles Iberia et Air Europa ainsi que la scandinave SAS facturent certaines prestations – boissons et collations – sur leurs vols moyen-courriers. British Airways ou Air France affirment ne pas vouloir se lancer dans cette voie. Elles continuent à proposer une prestation « sans mauvaise surprise », avec journaux et collation. Même si cette dernière s’est réduite comme peau de chagrin ces dernières années ! « Nous ne sommes pas dans la logique de transformer des prestations gratuites en options payantes, confirme Patrick Malval, directeur général commercial Europe de l’Ouest de British Airways. En revanche, nous travaillons à la création de nouveaux services payants apportant un plus aux passagers. »
Une politique de plus en plus restrictive pour les bagages
Une tendance que l’on retrouve chez toutes les compagnies traditionnelles. Ainsi, Air France propose par exemple l’option « siège plus », depuis 2009. Moyennant 50 à 70 euros, le passager peut réserver un emplacement plus spacieux près de la porte de secours de l’appareil. Reste que ce siège était auparavant distribué gracieusement, souvent aux voyageurs fidèles à la compagnie… Autre évolution notable, commune à tous les transporteurs : une politique plus restrictive pour les bagages. Si le premier bagage en soute reste gratuit, l’offre est devenue payante dès le second. Air France le facture 55 euros sur un Paris-Bogota avec un billet en classe économique ! Parallèlement, l’assouplissement des tarifs est devenu la norme. Fini ou presque les billets non modifiables. La contrepartie de cette plus grande souplesse est la mise en place de frais de modification, généralement 50 euros pour un vol moyen-courrier.
Rien ne semble donc arrêter cette frénésie de suppléments. Il faut dire que, selon une étude récente du comparateur de vols Skyscanner, 16 % des voyageurs français seraient prêts à payer plus cher un siège particulier, 15 % pour une connexion Internet en vol, 7 % pour être prioritaires dans une file d’attente. Du grain à moudre pour les départements que les transporteurs ont créés en vue de concevoir des « innovations »… payantes.

Ryanair s'affiche moins cher qu'Air France-KLM sur internet pour un vol Paris-Rome aller-retour. Le hic : Ryanair est plus cher au final. Car Le prix du billet chez Air France est quasiment sans surprise, alors que celui de la compagnie low-cost s'accompagne d'une ribambelle de surcoûts. Certains étant obligatoires comme l'enregistrement en ligne et le paiement par carte bancaire … ! En renonçant aux options facultatives, le prix de Ryanair atteint 138 euros, si on voyage avec un bagage en soute. contre 147 toutes options comprises.